Il faut souligner l’importance d’une autre grande période du ministère itinérant du Saint-Père, celle des voyages dans des régions plus visées par les missions, en Afrique et en Asie. Une expérience qu’ensuite il traduisit dans un de ses documents les plus significatifs, l’encyclique Sollicitudo rei socialis, où, mettant à jour les perspectives de la doctrine sociale de l’Eglise, et exposant en particulier la dimension morale du développement, il dénonçait le fossé toujours plus béant entre un Nord riche et un Sud pauvre et relançait l’idée d’une coopération entre les peuples selon une véritable réciprocité et solidarité.
En effet, l’expérience africaine fut d’un grand secours à Jean-Paul II pour connaître de l’intérieur la situation de nombreux pays ayant accédé depuis peu à l’indépendance politique, mais pas économique et encore souvent touchés par des conflits tribaux, raciaux et religieux. Le Pape soutint maintes fois les revendications de ces pays, demandant qu’ils soient respectés dans leur souveraineté, dans leur identité nationale et culturelle. Toutefois le Pape ne manqua pas de critiquer ouvertement la corruption de certaines classes dirigeantes et la misérable exploitation à laquelle les gouvernants soumettaient leurs populations. Je rappelle ici, entre autres, le pèlerinage dans l’ile de Gorée, au Sénégal, d’où des millions d’esclaves noirs étaient partis pour l’Amérique, enchaînés sur les navires. Le Saint-Père n’avait pas de texte, car il n’avait pas prévu de discours. Il improvisa en français, scandant lentement ses paroles. Il dit toute son émotion et sa souffrance, mais aussi toute son horreur et sa honte, à voir le « lieu » où des hommes, qui pourtant se disaient être chrétiens, s’étaient rendus responsables d’une épouvantable atteinte sur la vie d’autres hommes, des femmes et même des enfants.
Avec l’accord du cardinal Stanisław Dziwisz « J’ai vécu avec un saint »
Edition – Wydawnictwo Św. Stanisława – Cracovie 2013