Lorsqu’il fut plus âgé et plus faible, il se promenait de moins en moins à Castel Gandolfo. Mais il ne renonça jamais totalement à ses promenades. Il ne parcourait que de courtes distances, mais il les faisait. Il avait cela dans le sang. Les souvenirs des montagnes polonaises revenaient avec deux fois plus de force lorsque des familles amies de Pologne venaient à Castel Gandolfo. Il avait une quinzaine de familles qui venaient voir le Saint-Père : les Rybicki, les Malecki , les Tarnowski, les Ciesielski… Ils se mettaient d’accord entre eux pour savoir quelle famille viendrait rendre visite au Saint-Père, et à quelle date. Ils venaient à Noël, en été, généralement pour huit jours, parfois dix. Ils logeaient à Castel Gandolfo, chez les religieuses qui dirigeaient un hospice. Ils étaient invités quotidiennement à la messe et aux repas. Et au concert du soir, bien entendu. Les cantiques de Noël pour les Fêtes, les chants patriotiques an été.
– Ces visites réjouissaient-elles le Saint-Père ?
– Beaucoup. Ensemble, ils évoquaient les temps anciens, les expéditions dans la montagne, les excursions en kayak. Et ces fameuses messes, lorsqu’un kayak retourné se transformait en autel. Je me souviens les avoir entendu dire que le Saint-Père était toujours exigeant avec eux. Lorsqu’ils partaient en expédition, ils s’avertissent : « Ne laissons pas l’Oncle marcher en tête, car il finirait par nous épuiser ». Les Saint-Père était ému par ces souvenirs communs. L’ambiance était alors très familiale, chaleureuse.
– La Saint-Père aimait-il également évoquer des souvenirs ou préférerait-il écouter ?
– C’étaient surtout ses hôtes qui racontaient, mais le Saint-Père intervenait parfois. Ce qui m’a frappé lors de la première rencontre avec ses amis polonais, c’était la grande spontanéité et l’exceptionnel naturel du Saint-Père, il était ouvert et se comportait comme n’importe lequel d’entre eux. S’il n’avait pas porté sa tenue papale, nul n’aurait pu penser, en les regardant, qu’il s’agissait du Saint-Père et de ses hôtes. Ils formaient un groupe d’amis. Mais par moments, il devenait comme absent. Il priait, réfléchissait. Ils disaient alors : « Il ne faut pas déranger l’Oncle ».Ils savaient bien cela, il en était déjà ainsi lors des camps de kayaks, à l’époque de leur jeunesse.
Avec l’accord de l’archevêque Mieczysław Mokrzycki – « Le mardi était son jour préféré »
Edition M, Cracovie 2008