J’avoue en secret que j’avais un « contact visuel » avec le Pape que seuls lui et moi, nous connaissions. Cela durait des années et me donnait un véritable regain d’énergie. Chaque matin juste après 6 heures, même lorsque j’avais du temps libre et que je n’avais pas à me précipiter pour travailler, j’allais dans la cuisine de mon appartement et, avant même de mettre en marche la machine à café, je m’approchais de la fenêtre. Tout a commencé quand j’ai constaté que je pouvais voir exactement les fenêtres de la chambre papale, de la salle de bain et de toute la partie privée de son appartement, depuis ma cuisine au dernier étage d’un grand immeuble. En ligne droite, c’était peut-être une centaine de mètres. Un jour, en passant, j’ai regardé dans cette direction et j’ai remarqué qu’à ce moment-là le Pape apparaît à la fenêtre, regarde, jette un coup d’œil sur Rome, vérifie la météo, prie… La même chose les jours suivants. Alors j’ai commencé à me pencher par la fenêtre de ma cuisine et à lui faire signe. Il ne l’a pas vu au début, mais au fil du temps, je l’ai attiré par mon regard – nous étions très proches – et il a réagi. Dès lors, il savait que je l’attendais à la fenêtre tous les matins. C’était mon salut à distance avec lui. Ce n’est qu’après ce premier moment, lorsqu’il se tenait à la fenêtre et priait, tout en regardant Rome, qu’il passait à ses tâches quotidiennes. La prière était sa force, et avec lui j’ai aussi compris qu’elle apporte le réconfort lorsque les temps sont plus difficiles.
Magdalena Wolińska-Riedi “C’est arrivé au Vatican”
Éditions Znak. Cracovie 2020
