C’était censé être comme en Pologne, comme autrefois. Une nappe blanche, du foin dessous et une petite coiffe modeste au milieu de la table. Et des couverts pour un étranger qui pourrait frapper à la porte au dîner. L’archevêque dit qu’aucun étranger n’a frappé à la porte. Mais si tel avait été le cas, nous l’aurions certainement accueilli. Et je crois qu’il se sentirait chez lui. Nous nous sentions de cette façon. Le jeûne était en vigueur depuis le matin jusqu’au dîner. Les sœurs s’affairaient dans la cuisine. Une odeur savoureuse remplissait tout l’appartement – se souvient l’ancien secrétaire. L’odeur du bortsch, du poisson et de diverses pâtisseries, car on dit que les sœurs en font de très bonnes. Surtout des biscuits sablés que Jean-Paul II réclamait généralement en silence, dessinant un petit cercle sur la nappe avec son doigt. Les sœurs comprenaient ce geste sans paroles. Et elles n’ont jamais refusé de sucreries au Saint-Père – dit l’archevêque en riant. Même quand elles savaient qu’il devrait perdre quelques kilos pour sa santé. Après tout, on ne refuse pas au Saint-Père.
Jean-Paul II était plus silencieux que d’habitude. Le cardinal Dziwisz racontait un jour que c’était une journée de grande prière et de recueillement dans les appartements pontificaux. A l’approche de l’heure du réveillon, le Saint-Père se rendait à la chapelle pour “recommander à Dieu tous les pauvres, les abandonnés, les sans-abri, qui ce soir-là ne pouvait profiter de la chaleur du foyer familial”. Nous attendions ce réveillon de Noël – se souvient Mgr Mokrzycki. – Tout comme dans l’enfance. Le Saint-Père attendait aussi. Il regardait dans la cuisine et disait que ça sentait bon. Comme à la maison. Les sœurs Germania et Fernanda avaient beaucoup de travail. Elles cuisinaient quotidiennement pour les membres du foyer. Cette fois, elles devaient préparer plusieurs plats pour le réveillon pour une vingtaine de personnes. Elles confectionnaient aussi des pains d’épice et des biscuits sablés en forme d’étoiles – ajoute l’ancien secrétaire. – Il y avait toujours un gâteau, généralement un gâteau aux noix. Aussi un gâteau aux graines de pavot venu de Pologne et un cheesecake. Il y avait aussi de délicieux petits beignets.
Avec l’accord de Mgr Mieczysław Mokrzycki – “Une place pour tout le monde”
Maison d’édition Znak, Cracovie 2013
