On arrive au second voyage en Pologne, celui de juin 1983. Un voyage voulu fortement par Jean-Paul II, malgré les risques que ce voyage apparût comme une légitimation de l’état de siège que connaissait le pays. Un voyage difficile et contrasté, très loin du récit que put en faire le général Jaruzelski dans la déposition pour la cause de béatification de Karol Wojtyła. Il écrit, en effet, que ce voyage « s’était passé sans à-coups ». En fait, durant le séjour, le pape menaça deux fois de retourner à Rome.
La première fois, ce fut à l’arrivée à l’a aéroport de Varsovie. Contrairement aux accords entre les deux parties, Jaruzelski annonça au Saint-Père qu’une rencontre avec Lech Walesa ne serait pas possible. Mais le pape ne céda pas et exigea le respect des accords, menaçant de regagner Rome. La rencontre eut lieu, dans un refuge, dans la vallée de Chocholowska, mais sous le contrôle absolu des services de sécurité. Nous tous – le Saint-Père en premier – nous nous en rendîmes compte, en voyant tous ces étranges serveurs : il ne s’agissait que d’agents travestis. Le pape Wojtyła voulut aller parler avec Walesa dans le couloir pour éviter les écoutes indiscrètes. Il réussit, de cette façon, à donner une forte crédibilité à la figure et au leadership du syndicaliste, libéré un peu avant la visite de sa résidence forcée d’Arłamow.
La seconde fois que Jean-Paul II menaça de retourner au Vatican fut lorsqu’arriva une délégation du gouvernement, à Częstochowa, lui demandant instamment de ne plus évoquer Solidarność dans ses discours. Lui, au contraire, continua à en parler et à défendre les idéaux du syndicat, en vue d’une future reconstitution du mouvement. Dans l’entretien final avec Jaruzelski, le pape redemanda explicitement la fin de l’état de siège, le considérant comme indigne et humiliant pour toute la nation polonaise.
En somme, un voyage qui se montra décisif – comme le sera celui de 1987 – non seulement pour le renforcement spirituel et moral de la Pologne, mais aussi pour le soutien de ce processus de libération qui, en l’espace de quelques années, amènera à la chute du Mur et à la fin du communisme.
Avec l’accord du cardinal Stanisław Dziwisz « J’ai vécu avec un saint »
Edition – Wydawnictwo Św. Stanisława – Cracovie 2013